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De l’écologie des États à la géographie des pouvoirs : à propos d’Homo Domesticus, une histoire profonde des premiers États de James C. Scott

De l’écologie des États à la géographie des pouvoirs : à propos d’Homo Domesticus, une histoire profonde des premiers États de James C. Scott

Transfinis - décembre 2019


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Ce livre, sorti il y a pile un an, en janvier 2019 à La Découverte, se présente dès sa préface et son avant-propos comme un ouvrage de synthèse et un ouvrage politique. De ce point de vue, les choses sont limpides. Par une reprise de nombreux travaux anthropologiques et archéologiques qui sont réinterprétés, James C. Scott dessine la possibilité d’une vie sans États, au moins au passé, et tâche de montrer ce que cette anarchie peut avoir de supérieur à nos modes de vie actuels.

Un minimum de contextualisation est nécessaire, pour pouvoir se concentrer ensuite sur un point particulier de ce livre, élagué de beaucoup d’autres choses qui pourraient être dites. Il concerne l’idée de « forme-État » utilisée à un moment donné par James C. Scott alors que celui-ci pense le pouvoir sur des bases vitales et écologiques et, corrélativement, la possibilité de penser sans anachronisme ni caricature l’État et les pouvoirs contemporains à partir des premiers États connus d’il y a plusieurs milliers d’années. De quoi, en d’autres termes, une « histoire profonde des premiers États » permet-elle de faire la théorie, des États ou de la politique, de l’histoire antique ou de notre actualité ?

Révélé en France par son livre très tardivement traduit et récemment réédité, La domination et les arts de la résistance 1, James C. Scott a également écrit un Petit Éloge de l’anarchisme2. L’apparente clarté d’Homo Domesticus, qui vise à emporter l’adhésion, ne doit toutefois pas faire croire qu’il s’agit d’une esquisse ou d’une mise en perspective tronquée et militante où manqueraient le tact et la rigueur de la grande science. Certains des raisonnements tenus s’appuient sur plusieurs décennies de recherche, notamment sur les pays d’Asie, qu’on trouvera par exemple dans The Moral Economy of Peasant, rebellion and subsistance in southeast Asia, paru en 19763. La préface d’Homo Domesticus, rédigée par un préhistorien, a aussi pour but et pour effet d’apporter une solide caution scientifique à l’ouvrage dont il serait très difficile, sinon, de s’assurer des données de base, issues d’une littérature abondante mais très spécialisée et peu fréquentée sur le néolithique, les premières cités mésopotamiennes ou l’Asie antique.

Le déroulé du contenu du livre et ses perspectives politiques ont déjà été commentés depuis sa sortie il y a un an, sans soulever d’objection scientifique majeure. C’est d’ailleurs la politique qui a plutôt retenu l’attention4, tandis que l’ensemble des arguments de James C. Scott ainsi que leur agencement sont déjà résumés par lui dans les copieux avant-propos et introduction du livre (p. 10-50). On ne rappellera ici, pour les mettre en valeur, que les raisonnements qui touchent à l’ancrage géographique et technique des États, et plus généralement des pouvoirs - c’est-à-dire aux fondements écologiques des sociétés.

   

La thèse de James C. Scott consiste à dénouer tout rapport nécessaire entre l’apparition de la sédentarité, de l’agriculture et de l’État pour non seulement historiciser, fragiliser et dégrader les États au sein des communautés humaines, mais aussi pour indiquer la possibilité de la réversibilité historique de leur existence. Aucune cause mécanique, aucun horizon anthropologique, n’impliqueraient la formation des États, ce pourquoi on peut tout à fait en envisager la disparition durable et pourquoi pas définitive, et plus généralement penser que l’« État » n’est nullement un élément substantiel de la politique. À l’appui de cette thèse, les arguments principaux sont les suivants :

James C. Scott défend donc l’idée que l’agriculture céréalière est la matrice des États, à partir d’une abondance initiale (en quoi il se distingue d’Engels par exemple), ainsi que par une accumulation de processus historiques divers, où aucun de ces processus considéré isolément ne peut suffire à former un État. Il n’y a pas de cause à la formation des États, mais un ensemble de conditions qui les rendent plus ou moins possibles. Même l’agriculture des grains peut, par exemple, être pratiquée de façon sporadique en vue d’une alimentation de complément, sans être cependant étendue et systématisée.

Ces raisonnements, il est important d’y insister, ne sont nullement une robinsonnade visant à expliquer par des hypothèses historiques illustratives la nécessité des États, et avec elle celle de leur développement. Ce qu’étabit l’archéologie en effet, est que durant une longue période, les États n’ont cessé de disparaître, puis de réapparaître, pour des raisons écologiques et des raisons liées à la pénibilité des travaux agricoles. C’est qu’en l’absence d’expérience agricole et administrative, les États pouvaient difficilement durer et éviter de s’effondrer suite au mécontentement des populations, affamées ou peu désireuses de se livrer aux monotones et durs travaux de l’agriculture. L’esclavage de masse était alors une composante indispensable des États6, tout comme les murs, qui protégeaient les stocks et les populations, mais qui empêchaient aussi la fuite de celles-ci et leur reprise d’une existence non-agricole. Les premiers États n’ont pris que dans les régions isolées, encloses sur un certain territoire.

Les États ne sont ni nécessaires, ni désirables. Qu’ils soient substantiels à la politique est une illusion historique. Leur chronologie l’indique. Non seulement ils apparaissent et disparaissent en laissant des périodes entières se faire sans eux, mais ce n’est, de manière particulièrement frappante, que depuis 1600 environ que l’agriculture de masse, et ainsi la forme politique étatique qui en dépend, serait devenue majoritaire dans le monde, avec la colonisation européenne7.

Pour appuyer cette thèse étonnante et la débarrasser au maximum de toute téléologie, il faut aller voir de plus près ce que James C. Scott entend par État - car, après tout, que l’État ait mis 7000 ans entre la Mésopotamie et la colonisation européénne à s’établir comme une forme politique indispensable et majoritaire n’empêche pas de penser que cette forme devait logiquement s’imposer.

   

Selon lui, donc, les États ne sont en aucun cas en germe dans les communautés humaines, où la moindre famille serait destinée à former, en quelques générations, une Cité-État. Il n’y a aucune cause assignable à la formation des États, seulement des conditions nécessaires mais jamais suffisantes : il faut que la sédentarité s’allie à la pénurie alimentaire, que s’y ajoute la culture des grains, et même dans ce cas, la population en charge des travaux agricoles doit être contrôlée, aussi longtemps que les conditions écologiques de la production de nourriture tiennent. En parallèle à l’historicisation des États où ceux-ci perdent leur cours et leur nécessité, Homo Domesticus en dessine ainsi un portrait très particulier dans la mesure même où il en donne une assise géo-technique, déliée de toute signification culturelle, symbolisation, idéologie, tendance collective ou anthropologique. Les États existent par rapport à des enjeux de subsistance vitale dans un certain espace, grâce à des techniques de contrôle et de domination d’une part de la population sur une autre, sur fond d’une indésirabilité du travail et sous réserve de maîtriser l’impact écologique de la production de nourriture. Leur existence est liée à la matérialité au sens le plus brut et le plus strict, elle y trouve ses conditions et sa précarité.

Les États ne correspondent ainsi qu’à la juxtaposition de certaines conditions d’exercice du pouvoir où se jouent plus ou moins rapidement leur formation et leur dissolution, et où leurs différentes caractéristiques déterminent leur histoire sans que celle-ci soit jamais orientée ou assurée, aujourd’hui comme hier. On peut de la sorte en dresser ce portrait analytique.

Cette perspective écologique fait boucle avec les enjeux vitaux de subsistance que les États doivent assurer sous peine de disparaître. Elle donne son titre au livre en français, Homo Domesticus. Tout État va de pair avec la création d’un domaine qui est aussi un milieu transformé où les humains sont tout autant les acteurs des transformations que leur objet. Ce ne sont pas seulement de nouvelles maladies qui apparaissent. Ce sont aussi la sélection et la modification des variétés animales et végétales qui créent une interdépendance, une exploitation réciproque des hommes et de la nature de telle sorte que l’on peut se demander qui des êtres humains et des chiens ou des chats ou des variétés cultivées de blé profitent le plus des autres.

La largeur du propos ainsi ouvert, certes stimulant, amène aussi à douter de sa validité. Ramené à une juxtaposition de traits aussi variés que généraux, sur une base vitale elle aussi extrêmement large et générale, on peut se demander si la conception de l’État défendue dans Homo Domesticus n’est pas victime de ses sources historiques antiques, proto-historiques et préhistoriques. Le portrait matérialiste et précaire des États convient peut-être aux anciens centres urbains de Mésopotamie, mais que faire des cités de la Grèce classique, de la Renaissance italienne, de la féodalité française ou des États contemporains ? Le problème ne tient pas qu’à la transformation des États au cours de l’histoire, il tient aussi aux nombreux biais historiques que peuvent provoquer des sources archéologiques. Nulle trace de facteurs culturels, intellectuels ou religieux dans les réflexions de James C. Scott, ce qui fait la force de son propos; mais cette absence pourrait n’être que celle de l’absence d’archives, et non une absence réelle, ce qui mettrait à mal son approche matérialiste des États.

Comme on va le voir, répondre à la première question - sur les transformations de la « forme-État » - donne de quoi répondre, quasi mécaniquement, à la seconde - sur le biais archéologique, et ainsi matérialiste, des thèses d’Homo Domesticus.

   

S’interrogeant sur la possibilité de définir et de reconnaître un État, même antique, James C. Scott écrit : « Il n’existe pas de réponse tranchée à cette question ; de mon point de vue, la “forme-État” est une question de degré plutôt que de nature bien délimitée. Elle repose sur toute une série d’attributs plausibles et, dès lors qu’une entité sociale et politique possède un plus grand nombre de ces attributs, il est d’autant plus probable que nous la considérions comme un État » (p. 133).

La dimension d’incertitude (« plausible » et « probable ») est tout autant objective (elle dépend de ce que l’on peut reconstituer ou percevoir de l’entité politique et sociale en question) que subjective (elle est liée à un effet de seuil où il est vain de prétendre pouvoir arriver à un jugement indiscutable). James C. Scott se heurterait à des difficultés classiques quand il s’agit de traiter de l’État, celle de l’opacité de celui-ci en tant qu’il est lié aux secrets de la domination et du pouvoir, et celle de la détermination de ses limites en tant que l’État chercherait à être le plus exhaustif possible dans ses contrôles. Inverses l’une de l’autre bien que simultanées, ces deux difficultés mettent la pensée au rouet quand il s’agit de saisir la réalité de l’État.

En réalité, les analyses d’Homo Domesticus permettent de faire un pas de côté par rapport à ce problème, en répondant en partie, mais en partie seulement, à la question qui le commande. À quoi reconnaître un État s’il n’est qu’une addition de caractéristiques, susceptibles d’être séparées les unes des autres et, donc, plus ou moins rassemblées ? Autrement dit, pour se tenir au plus près du livre, comment distinguer les organisations collectives de subsistance étatiques et non étatiques ? Les différents critères proposés par Scott (fiscalité, fonctionnaires, exécutif, hiérarchie, roi, p. 133) ne sont guère éclairants à eux seuls, mais leur recoupement avec les conditions qui sont proposées de l’établissement des États et avec les analyses de leurs devenirs permettent de proposer une réponse.

D’une part, les processus les plus décisifs qu’on trouve à la source des États antiques impliquent des contrôles centralisés : la fiscalité, comme prélèvement, stockage et assignation des ressources implique une instance d’addition de toutes les sources fiscales, tout comme la protection des champs et des populations dédiées à l’agriculture implique une coordination des gardes. D’autre part, dans les périodes de guerre, de disette ou d’autres difficultés, dit Scott, les lieux d’organisation, de collecte et de distribution des ressources que sont ces États font pression sur leur périphérie agricole tout en concentrant leurs forces pour se maintenir malgré les mauvaises passes, au risque d’accroître les difficultés en voyant ces périphéries leur échapper ou se dissoudre. Inversement, au cours de leur développement, les États doivent aller chercher leurs ressources de plus en plus loin à mesure qu’ils épuisent celles qui se trouvent au plus près d’eux, ce qui leur coûte de plus en plus et les fragilise. Bref, le propre d’un État serait d’être un centre, particulier, centralisateur et concentré au sens le plus spatial ou géographique du terme, et de devoir se maintenir comme tel malgré les risques de décomposition sociale et écologique de ses alentours. La difficulté à saisir les caractéristiques d’un État ne tiendrait pas à l’alliance qu’on y trouve de dissimulation et contrôle tendanciellement illimité, mais à la nécessité pour tout État d’être un centre en mouvement, de se transformer pour se maintenir, au risque du délitement ou du repli.

Ce raisonnement est tenu, dans Homo Domesticus, au plus près des données historiques et archéologiques disponibles. Il s’établit par exemple dans l’analyse remarquable de la manière dont les premiers États se sont établis sur les fleuves pour réduire au maximum les coûts de transports des ressources qui leur étaient nécessaires, notamment en bois de cuisson, ce qui les a néanmoins amené petit à petit à détruire de plus en plus loin les milieux forestiers qui leur assuraient non seulement leurs ressources en bois, mais aussi toutes les autres par modification de l’ensemble des variables écologiques (notamment hydrologiques)8. Il serait absurde de transposer directement ce type de problème à des États plus tardifs ou contemporains, et d’en faire, par exemple, tel quel, le moteur du commerce international ou de la colonisation et de leurs limites. Mais on peut bien saisir par là quelque chose des États, non pas en se focalisant sur eux, mais en les saisissant comme pris dans des conditions écologiques en fonction de la géographie des pouvoirs politiques où les États essaient d’agir comme centres.

Les premiers États donnent en effet avant tout l’exemple d’un pouvoir centralisé apparu dans certaines conditions écologiques et de mise en culture, pouvoir centralisé qui cherche à allouer des ressources vitales à une population, et dont le maintien n’est possible qu’à condition d’y réussir tout en contrôlant le travail et les déplacements de cette population. Ces premiers États sont ainsi, comme on l’a vu, aussi fragiles dans la durée que contingents dans leur apparition. Mais cette contingence doit s’entendre dans un double sens, et l’absence possible des États qui s’ensuit se comprendre de deux manières différentes et opposées - alors que James C. Scott n’envisage qu’une seule alternative à l’absence d’État.

On peut d’abord y voir, ainsi qu’il le fait à partir des exemples antiques, un retour à un mode de subsistance délivré d’une bonne part du travail, permettant une plus grande liberté et une plus grande diversité écologique. Mais on peut aussi voir dans l’absence d’État la possibilité d’un autre contrôle des populations et de leurs moyens de subsistance sans qu’un centre décisionnel, économique ou technique soit nécessaire. La coordination et la vitesse possible des interventions humaines en différents points de l’espace peut ouvrir à de nouvelles formes de pouvoir qui ne sont ni nomadiques, ni lignagères, ni étatiques. Autrement dit, la disparitition de centres de distribution, de contrôle et de protection peut signer la fin d’une forme de domination, ou être remplacée par d’autres dispositifs. À suivre James C. Scott, l’essentiel d’un État est d’assurer un contrôle technique des mouvements humains par domination physique et vitale dans un environnement de subsistance qu’il s’agit de faire durer. Or rien n’implique que ce contrôle doive être centré si les moyens techniques permettent de faire autrement, par une coordination dont les conditions spatiales et temporelles ne requerraient pas de centre particulier et fixe. La politique n’étant que l’obtention de la subsistance d’une population par des moyens techniques relativement à une certaine écologie, elle peut passer par un État ou non, passer par une domination étatique ou d’une autre forme.

Là est sans doute tout l’intérêt d’Homo Domesticus qui, en proposant une histoire profonde des premiers États, ne propose pas, de fait, une théorie de l’État, mais bien une théorie du pouvoir politique dont la « forme-État » n’est qu’une expression à la teneur intellectuelle et historique très incertaine. À la différence de Clastres, James C. Scott ne fait pas, en effet, porter à l’État tout le poids des maux socio-politiques, ce qui permettait à Clastres de suggérer que l’État est quelque chose de clair9. Les sociétés nomades et lignagères connaissent aussi l’esclavage, la domination, etc. Puisqu’il s’agit avant tout de se nourrir pour vivre, tous les modes de vie s’affrontent à des conflits, de la violence, des déplacements, des disparitions écologiques ou démographiques, qu’il y ait État ou pas. Celui-ci n’est qu’une des solutions possibles, peut-être très mauvaise, aux enjeux de subsistance, solution dont il ne faut en tous cas pas exagérer la netteté formelle ou la pérennité historique.

Mais peut-on s’en tenir à ces enjeux vitaux, en négligeant l’État comme horizon idéal de toute société ? Oui, puisque l’idée de l’État comme politiquement substantiel et d’indépassable pour penser les communautés humaines serait avant tout le fruit d’une myopie historique, tandis que nous serions inconscients ou peu sensibles aux très longues durées historiques qui s’étendent sur des dizaines de milliers d’années, et que nous serions saturés des justifications idéologiques que les États produisent pour s’auto-légitimer. Mais, de ce point de vue, il ne semble pas que les idées pèsent lourd face aux conditions matérielles des régimes politiques. L’archéologie permet de mettre au jour des effondrements extrêmement rapides, où aucune progressivité, discussion ou hésitation ne sont visibles, n’ont suscité de moyens ou de désir d’enregistrement. Rien ne semble pouvoir résister aux effets de certaines absences - de thérapies, de nourriture, de ressources naturelles - quoi qu’il en soit des assises culturelles et idéologiques des pouvoirs politiques.

C’est peut-être là que l’ouvrage de James C. Scott est le plus troublant. D’annihilation et d’effondrement, dit-il, il n’y a pas en réalité, même dans les pires catastrophes imaginables à partir des données archéologiques. L’illusoire impression d’effondrement vient de la désertion des monuments de l’État lorsque ces derniers sont suffisamment solides pour être retrouvés par les archéologues. Mais les vivants, du moins certains d’entre eux, survivent. Il y a seulement dispersion et passage à un autre mode de vie, d’où l’écriture disparaîtrait en même temps que les nécessités du contrôle et de l’organisation étatiques, comme le rappelle une citation de Levi-Strauss placée en exergue du livre. C’est l’absence d’écriture et non pas l’absence de vie qui caractériserait les âges dits « sombres » qui encadrent la formation et la disparition des États. Et, ajoute James C. Scott, ce serait pendant l’un de ces âges sombres que l’Iliade et l’Odyssée auraient été formés, par une création orale, avant d’être fixés par écrit lors du retour des formes étatiques 10. Nous nous souviendrions au cœur des États des récits oraux des temps sans État, alors que les cultures d’État sont, elles, balayées par les transformations écologiques à moins qu’il n’en reste des écrits ou des pierres, bien que, enfin, ces cultures étatiques se soient imposées petit à petit par un long apprentissage de ce que sont les conditions écologiques des États. Tous les jeux sont ouverts.

 

Stéphane Zygart


  1. Publié en 1990 par l’université de Yale où James C. Scott fut professeur, en français en 2009 par les Éditions Amsterdam↩︎

  2. Traduit en français aux éditions Lux en 2013.↩︎

  3. Également édité par l’université de Yale.↩︎

  4. Voir les lectures de Contretemps, Lundi Matin, Lectures.org↩︎

  5. « Against the grain », ce qui veut dire aussi contre les idées reçues.↩︎

  6. Certains considèrent qu’en 1800, 80% de la population mondiale était en situation d’asservissement, sous des statuts divers (p. 173).↩︎

  7. p. 234, qui indique que d’autres auteurs proposent des césures encore plus tardives.↩︎

  8. Voir le chapitre VI, « Fragilité de l’État archaïque, effondrement et désagrégation », en particulier le schéma p. 212.↩︎

  9. James C. Scott offre également une solution à l’un des paradoxes de la théorie de Clastres de sociétés contre l’État : si certaines sociétés se prémunissent des formes de pouvoirs étatiques qu’elles ne semblent pourtant pas avoir pu connaître, ce serait parce qu’elles ont bel et bien connu, à un moment donné de leur histoire, l’État, mais qu’elles l’ont fui et en ont gardé la mémoire.↩︎

  10. Voir p. 230.↩︎