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Formes de vie, formes d’existence et politique

Formes de vie, formes d’existence et politique

   

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Transfinis - Septembre 2024

   

Version d’origine du texte paru dans le volume collectif Discours et politiques de l’identité à partir de Michel Foucault paru au PUS en 2021

   

L’indexation de nos appareils législatifs sur la vie comme valeur et comme fait, comme impératif à défendre et comme donnée, est une constante ambiguë et bancale. Dans nos lois contemporaines, on trouve en effet toujours des mixtes où ce que justifie la vie se mélange à d’autres choses qu’elle. Aux côtés des données biologiques et de la valeur cardinale de la vie jouent toujours d’autres données et valeurs, et la référence à la vie n’est jamais pure ou suffisante. Le montrer, l’analyser, le problématiser peut avoir des effets en éthique ou en épistémologie de la médecine. Mais c’est dans un but d’éclaircissement politique qu’on voudrait le faire ici : quel contre-pouvoir politique opposer aux pouvoirs qui réalisent, actuellement et durablement, « l’inégalité des vies » que Didier Fassin a décrite dans son dernier livre, La Vie. Mode d'emploi critique, inégalité qui nous fait tolérer la mort des uns au nom de la vie des autres1 ? En partant du même constat que celui-ci, on voudrait le questionner autrement, et donc apporter d’autres réponses. En effet, Didier Fassin explique cette inégalité des vies qui nous choque par l’importance que nous accordons à la « biolégitimité » – à la façon dont vivre donne automatiquement des droits – alors qu’en réalité cette biolégitimité n’épuise pas la politique et nos rapports réels aux autres vivants, c’est-à-dire qu’elle ne va pas jusqu'à une « biopolitique » telle que Foucault en avait tracé les contours possibles2. Il nous semble qu’il faille aller plus loin et que l’examen de nos lois actuelles montre que la vie n’est jamais en elle-même la seule explication de la forme du droit, et n’en est ainsi jamais la seule source. La vie nous donne certes des droits, mais jamais à elle seule ou par elle seule. Il n’y aurait donc pas de « biopolitique » mais pas non plus de « biolégitimité ».

Quelle serait alors la consistance de nos politiques d’inégalité entre les vivants, bien réelles, en fonction de laquelle élaborer les voies de transformation de ces politiques ? L’analyse de la présence et de l’usage de la notion de vie dans les textes de lois français – ce qu’on pourrait appeler la « biolégalité » – oblige à comprendre ce qui est actuellement fait aux vivants autrement qu’en termes de « biolégitimité » ou de « biopolitique ». Les confusions amphibologiques que la référence à la vie permet et les problèmes qui peuvent être posés à partir d’elle, comme celui du clos et de l’ouvert individuel et collectif (dont la philosophie d’Esposito est un des points d’aboutissement) ou comme celui du fondement du pouvoir dans le droit de mettre à mort ou d’épargner (ainsi qu’Agamben n’a cessé d’y réfléchir) doivent être révisés à partir de la multiplicité des valeurs et des repères qui travaillent en réalité nos choix politiques. C’est aussi dans cette perspective qu’un retour critique sur la notion de « forme de vie » nous paraît nécessaire, en tant que cette notion tend à constituer le point de fuite commun des éthiques et des politiques de la vie contemporaines quelle que soit la manière dont on les conçoit – à partir de Foucault, de Wittgenstein ou de ses usages dans les politiques du care telles que Sandra Laugier a pu par exemple les proposer. Cette idée de « forme de vie » ouvre certes à des possibilités de compréhension précieuses et incontournables, mais ne nous semble pas permettre d’épuiser le sort qui est fait aux vies et les causes de celui-ci. En complément de la « forme de vie » (et non en contrepoint), il faut conceptualiser autre chose. La parrêsia en est une source critique et, à titre d’indication, on désignera ce complément par l’expression de « forme d’existence », en tâchant de la justifier à la fin de cette contribution.

   

La vie dans les lois : précarité et puissance des dispositions

Pour se munir d’une boussole factuelle, et bien que l’objectif ne soit pas de traiter de problèmes de médecine, il est utile évoquer trois cas de lois bioéthiques, trois lois différentes où s’exprime la manière malaisée, mal ajustée, que nous avons d’indexer notre droit sur la vie. L’intérêt d’examiner trois cas de bioéthique, et pas seulement un seul, est de montrer que la vie est prise à chaque fois dans des réseaux de notions différents où ces notions jouent d’une part le rôle de différentielles en permettant de définir des changements dans le traitement des vivants, d’autre part permettent d’accorder à la vie des significations à la puissance de vérité variable. En d’autres termes, dans chacune de ces lois, ce qui différencie les vies change, et la vérité de la vie ou la vie comme vérité n’a pas le même statut. On pourrait dire que le régime de vérité de la vie n’y est pas le même par la façon dont « la vie » autorise à différencier « les vies »3.

Premier cas : le droit à l’oubli pour les malades du cancer tel qu’il a été établi par la loi du 26 janvier 2016 sur la « modernisation de notre système de santé ». Elle autorise les anciens malades du cancer à ne pas déclarer aux assurances leur épisode pathologique passé, moyennant certains délais suivant l’âge de fin des soins et suivant le type de cancer4. Cette loi se construit au moins par un triple rapport à la vie qui se donne à lire dans la retranscription des débats parlementaires auxquels cette loi a donné lieu à l’Assemblée Nationale et au Sénat5. D’abord, elle prétend se baser rigoureusement, et uniquement, sur les dernières avancées de la recherche en matière de soin et d’épidémiologie des cancers : c’est parce que l’on sait qu’il n’y a statistiquement pas un nombre de rechutes significatives passé un certain temps après une guérison qu’on établit, au nom de cette donnée, un droit à l’oubli. Cependant, des choix sont bel et bien effectués parmi les savoirs statistiques des médecins et des assureurs. Ainsi, bien que la plupart des rechutes aient lieu peu de temps après une première guérison, on ne prend pas en compte la modulation des risques au cours du temps – même chez les patients jeunes, qui auraient besoin de crédit sans attendre, donc d’assurances et de la protection de cette loi. Cependant, sur d’autres bases, l’existence sociale et économique des individus peut aussi être prise en compte : suivant l’exemple pris au cours des discussions entre parlementaires, pour garantir la possibilité aux architectes malades d’exercer leur métier, un plafond maximal des polices d’assurance est adopté.

Dans ce cas de figure, la constitution de la pluralité des vies à partir de la vie se fait par la mise en relation de la valeur de la vie avec d’autres valeurs. On accorde une valeur de référence aux données biologiques en la mettant en relation avec les possibilités individuelles et sociales de développement économique. Ces possibilités forment des vérités à la fois concurrentes et complémentaires, et finissent par faire la différence entre les vies d’ex-cancéreux qu’on avait préalablement identifiées et valorisées. Le déploiement des vies et de l’économie est mis en balance, à partir d’une double indexation de valeurs.

Deuxième cas, plus récent, datant du 15 mars de l’année 2018. Il s’agit d'une recommandation de la Haute Autorité de Santé en matière de limitation et d’arrêt des soins, lesquels ont pour but de laisser la mort advenir par abstention du traitement médical sans que la mort soit directement provoquée (ce qui serait une euthanasie et ce qui reste interdit par les lois françaises). Cette limitation des soins, dit l’agence publique, ne doit être enclenchée que si la mort est attendue « dans les quelques heures ou jours »6. Le savoir d’une mort imminente justifie seul le retrait de la médecine curative suivant, encore une fois, le suivi d’un savoir précis qui permet de décider ce qu’il faut faire des vies mourantes. Ce qui est alors frappant, c’est que de l’aveu même des médecins, ce savoir n’est pas totalement fiable : ils ne savent pas à coup sûr quand, et même si un malade en fin de vie va mourir. Suivant un calcul mené à partir d’une base de donnée internationale, dans 7,5 % des cas, les patients auxquels on retire tout traitement pour des raisons thérapeutiques survivent7. Cette donnée, la Haute Autorité de Santé ne peut pas l’ignorer. De la sorte, si les cadres réglementaires qu’elle fixe ne sont pas modulés par autre chose que des données biomédicales (à la différence du cas précédent), ces cadres reposent néanmoins sur l’aménagement des incertitudes statistiques qui sont ici effacées. Cet effacement est peut-être un pis-aller. Mais il doit aussi se comprendre d’une autre façon tandis que les cadres réglementaires se doivent d’être légitimés et pérennes : dans un horizon de longue durée, on peut ne pas tenir compte des erreurs pronostiques puisque celles-ci sont amenées à disparaître avec les avancées du savoir médical. C’est la nécessité de juger des vies à partir d’un savoir sur la vie et la croyance en la possibilité d’un jugement sûr qui s’exprime ici. D’un côté, on ne peut laisser partir une vie que sur la base d’un savoir biologique positif, d’un autre côté ce savoir devrait finir par rendre compte de ce qui se passe vraiment. La volonté d’ajustement du droit des vivants sur le fait biologique parie et anticipe sur la vérité du savoir médical.

Troisième et dernier cas : celui d’une circulaire du Recteur de l’Académie de Paris, en date du 26 janvier 2018. Elle énonce que, dans le cadre de la mise en place des réformes de l’enseignement supérieur en France, les modalités d’orientation et d’accueil centralisés des étudiants handicapés dans les universités d’Ile-de-France sont suspendues. Aux étudiants et à leur familles de prendre l’initiative et de se renseigner auprès des établissements8. D’abord, cette circulaire se base sur une différence entre les vies qu’il faudrait laisser jouer de la manière la plus brute possible : suivant leur puissance d’initiative et de persévérance, les étudiants trouveront les réponses qu’ils cherchent, ou non. Ensuite, la différentielle qu’on décide de laisser opérer entre les vies n’a aucune prétention à être scientifique mais repose sur une expérience grossière de la matérialité des choses : rien n’indique que la suspension des dispositifs d’orientation soit définitive tandis qu’on laisse supposer qu’elle ne s’explique que par l’insuffisance des moyens. Cependant et enfin, cette matérialité grossièrement appréciée n’est pas sans effet sur la production de la vérité, puisque nombre d’informations vont se trouver dispersées ou impossibles à constituer faute de centralisation (plus de répertoires, plus de statistiques sur les accueils). Ainsi, dans le cas de cette circulaire, la vie est prise dans son sens de puissance différentielle (l’initiative et l’endurance) qui ouvre aux possibles, suivant une perspective néolibérale classique où la matérialité des choses, la puissance des vies et les moyens sociaux valent à la fois comme vérité et comme facteurs de transformation permanents de cette vérité9.

Suivant ces trois exemples très brièvement analysés, des vérités, tirées de la vie, plus ou moins scientifiques, étayent les lois – épidémiologique, biomédicale – du dynamisme vital. On aurait affaire là à une biopolitique, au sens littéral où ces vérités de la vie nous autorisent à faire des différences entre les vies. Mais d’autres facteurs de différenciation s’adjoignent en réalité à chaque fois à ces vérités pour nous permettre de construire complètement nos choix politiques – le développement économique, la clarté des repères éthiques, la matérialité de nos moyens d’existence. Et ce que la vie et les vies valent en vérité varie en conséquence, suivant qu’il faut combiner la vie avec d’autres choses qu’elle (l’économie), tenter de rejoindre son cours exact (de dépérissement) ou laisser jouer sa puissance (de réalisation de la liberté). Ces alliances instables, il faut le noter, se forment non pas au sein de systèmes normatifs parallèles aux textes de loi, mais au cœur même de la légalité et de ses niveaux de pouvoir (tantôt lois organiques, tantôt règlements, tantôt circulaires). Si la vie joue comme norme, c’est-à-dire comme fait fixant ce qui doit être, elle le fait donc toujours par miction avec d’autres choses qu’elle. Ces différentes mictions changent sa signification et sa valeur, tandis qu’elle atteint sa pleine puissance prescriptive par ces formes légales composées. Pour concevoir adéquatement ce qu’est une biopolitique, il faut par conséquent y réintroduire la forme de la loi tandis que nos appareils législatifs fonctionnent en s’écartant de la seule vérité de la vie pour introduire des différences entre les vies. Foucault établissait qu’il n'y avait pas de lois sans normes. Il faut ajouter pour saisir pleinement les différences collectives que nous faisons entre les vies qu’il n’y aurait pas de normes sans lois, suivant des corrélations complexes.

Il faut essayer de préciser au maximum ce point, qui ne signifie pas que la vie n’a de valeur normative que par les lois, et qui suppose encore moins que l’inscription de la vie dans le légal corresponde à une tendance contemporaine à codifier le maximum de choses. On peut synthétiser les différentes figures qui se sont présentées en 6 points.

  1. D’abord, d’un point de vue politique, si la loi est structurée par la norme, si nos lois prétendent suivre le cours des vies, biologiques et fonctionnelles, l’efficace collective de la norme passe par la loi, c’est-à-dire que la référence à la vie ne fonctionne, dans l’affrontement des pouvoirs et des contre-pouvoirs, que si elle passe à un moment ou à un autre dans un code.

  2. On serait tenté au premier abord de préciser les rôles et les appuis réciproques de la manière suivante, qui pourrait largement se baser sur de nombreux textes de Foucault10 : la norme donnerait à la loi sa positivité et l’étayerait sur la reconnaissance du continu, de toutes les gradations du réel et des vies réelles ; la loi assurerait, à partir de cette assise, les fonctions de partage et de légitimation de ce partage en entérinant avec une part d’arbitraire les coupures entre le normal et l’anormal. La positivité et la continuité des normes s’articulerait à la loi comme légitimité des partages.

  3. Mais cette répartition des rôles ne tient pas et n’est qu’une simplification. En effet, la référence à la vie possède également une puissance de légitimation, que Didier Fassin justement nommait « biolégitimité » et qui peut en tant que telle être utilisée en dehors des cadres légaux, même si sa puissance est alors faible, voire très faible. Réciproquement, la loi dit aussi quelque chose du réel en s’appuyant sur lui tandis qu’elle fait référence à d’autres critères que la vie pour effectuer des partages entre les vies. Il faut considérer la biolégitimité et le réalisme non vital des lois.

  4. De là, dans nos lois, la corrélation d’une double légitimité, la mise en œuvre d’une double logique de légitimation dont les deux parts constituantes doivent être prises en compte pour comprendre ce qui est socialement toléré – comme l’absence de protection, le retrait ou la non-intervention – même si cela peut, par ailleurs, être perçu comme intolérable. À la biolégitimité de la protection des vies s’adjoint, pour reprendre les exemples précédents, la légitimité de l’économique (système assurantiel), des coupures éthiques (définition de délais), légitimité qui peut être accrochée aux moyens matériels (suspension de dispositifs).

  5. Si ce genre d'édifice dessine un espace en tension du tolérable, il reste précaire et fragile dans la mesure même où il opère des rapprochements entre des continuités et des discontinuités vitales d’une part, et d’autres types de continuité et de discontinuité qui ne se correspondent pas et ne dessinent pas des parallèles. Les courbes statistiques des assurances et celles des processus biologiques n'ont pas nécessairement les mêmes points de renversement. La survenue de la mort n’empêche pas que l’agonie soit encore une vie et que les interventions médicales sur la vie connaissent donc, alors, des cessations qui ne suivent pas les vies en cours. Les degrés et les seuils de dysfonction vitale ne sont pas forcément les mêmes que les degrés et les seuils de dysfonction sociale, et il y a entre eux une interaction permanente. Autrement dit, le parallélisme entre la vie et nos actions sur la vie est une chimère, même dans le cas de la fin de vie où le suivi le plus précis possible est recherché : intervenir, c’est lutter ; cesser d'intervenir, c’est ne pas attendre le fait de la mort pour en prononcer les conséquences de la survenue.

  6. On peut, au-delà de la diversité des cas, discerner une cause générale de cette absence de parallélisme alors que nous prétendons fonder nos normes et lois sur la vie. La référence à la vie donne comme repères principaux les seuils de la naissance et de la mort et entre ces seuils une continuité vitale, à la fois fragile et résistante. Ce qui se fonde ainsi dans la vie et ce sur quoi jouent les pouvoirs qui s’en réclament, ce sont la venue au monde et le décès, la protection de ce qui naît et la mise à mort, ainsi que toutes les interventions possibles sur le cours des vies. Mais ces dernières n’ont pas de position assignable, et nous ne pouvons donc pas les indexer seulement sur le cours des vies. Si agir pour ou contre la mort correspond à des actes dont l’importance va quasiment sans le dire, la question de savoir quand et en vue de quoi agir dans le temps intermédiaire qui va de la naissance à la mort est toute autre : la difficulté n’est ainsi pas tant de penser la défense de la vie ou la mise à mort que l’immense et problématique intervalle dans lequel se loge la souffrance. Si nous dénonçons sans cesse le risque de la mort, nous ne savons guère produire des discours sur les souffrances subies. Nos témoignages portent peu sur toutes les vies maltraitées en transit tandis que nous ne cessons de faire attention aux morts qui surviennent.

C’est pour cette raison qu’il faut dénouer autant que possible, pour le déjouer, le jeu si problématique des discontinuités et des continuités opérées par nos lois, et que, pour y parvenir, il faut y reconsidérer le rôle de la référence à la vie : rôle-clé certes, mais qui, considéré isolément, masque sans doute l’architecture réelle de nos choix et piège leurs mouvements possibles dans des alternatives réduites et des argumentations incomplètes.

   

Les limites de la vie comme fondement et comme prisme descriptif

En dehors des exemples biomédicaux dont nous sommes partis et d’une manière plus générale, on peut trouver dans les analyses que Foucault fait des pouvoirs, et du biopouvoir en particulier, un jeu constant entre le continu et le discontinu. La couverture totale des systèmes panoptiques a ainsi comme but de découper et de séparer les individus ; la souveraineté se lie aux sujets par la constance de son omnipotence, mais elle se rappelle régulièrement à ces sujets par la puissance de certains signes et de certains actes remarquables. Pour le biopouvoir, l’articulation entre le continu et le discontinu passerait par celle des horizons de catastrophe et des aménagements à la marge statistiquement définis.

D’une part en effet, comme Foucault le souligne au sujet de l’instauration des systèmes de sécurité sociale, ceux-ci s’établissent à l’occasion d’une catastrophe qu’ils ont pour rôle de conjurer – le plan Beveridge est établi lors de la Seconde Guerre mondiale, immédiatement suivi en France par le plan de Laroque11. On retrouve également ces horizons catastrophistes dans les théories de la dégénérescence ou dans le racisme, qui sont hantés par l’idée de fin de la race ou par celle de disparition de l’humanité au bout d’un lent processus d’affaiblissement12. D’autre part, face à ces catastrophes menaçantes, les réactions qui se proposent sont parfois violentes et guerrières, mais sont surtout de longue haleine. Séparer par exemple les races ou se débarrasser d’une mauvaise race prend énormément de temps, si tant est que la tâche puisse être menée définitivement à bien13. C'est ainsi qu’actuellement, les parades aux destructions (sociales ou de la nature) que nous anticipons passent par des aménagements progressifs, ce que Foucault a appelé « normation » : plutôt qu’imposer une norme d’un bloc, une fois pour toutes et par des repères fixes (normalisation), la normation s’appuie sur la naturalité des choses pour les modifier petit à petit, s’emploie non à faire correspondre les courbes à un modèle préalablement projeté, mais à lisser les courbes en les rapprochant les unes des autres14.

D’une manière générale, l’action politique fondée sur le biopouvoir passe par la menace d’une catastrophe que l’on passe son temps à éviter par des modifications statistiques constantes et de faible ampleur. Un bouleversement à venir justifie un changement permanent. Emblématiquement, une homologie peut être établie sur ce point entre les raisonnements écologiques et les réformes gouvernementales contemporaines : face au néant qui vient, planétaire ou institutionnel, il faut s’efforcer de changer les choses petit à petit. Une destruction future qui n’implique pas d’urgence mais, tout de même, une adaptation constante de nos manières d’agir : la logique politique rejoint ainsi, également, le vécu de nos existences individuelles, mortelles mais qui ne cessent de s’efforcer à continuer. Ce schéma est le plus englobant que l’on puisse faire de la structuration des manières d’agir par la « vie » et de l’aménagement qui en découle de la continuité sous condition de discontinuité. On peut néanmoins relever d’autres combinaisons plus précises du continu et du discontinu que la vie permet de modéliser, et sur lesquelles les pouvoirs se présentant comme biopouvoirs s’appuient.

D’abord, la plus simple et la plus intimement liée au couple catastrophe/statistique, celle de la plasticité du vivant et du risque de l’irrémédiable. C’est spécifiquement le thème de la dégénérescence et de ses dangers.

Puis le couple communauté/individualité. Tous les vivants sont liés et interagissent, ce pourquoi il convient de se couper de certains d’entre eux afin de se protéger : problème particulier du racisme, de sa détection, de sa réalisation possible.

Couple qui peut s’ensuivre, celui de la naturalité des relations opposée à leur caractère construit. Il s’agit d’y penser la corrélation entre la naturalité des phénomènes et ce qu’il faut calculer et évaluer pour pouvoir agir. Se pose là le problème de l’idée faussement simple de normation : si l’on prétend y suivre les courbes naturelles, c’est pour les modifier. Or, cette modification ne peut que s’appuyer sur des discours qui ne se contentent pas de suivre la naturalité des phénomènes. Cette difficulté est la plus proche de celles dont nous sommes partis avec les exemples médicaux.

Par une variation sur ce thème, une dernière combinaison peut être distinguée, celle de la totalité en tant qu’elle doit être progressivement conquise et comprise, alors qu’elle est également saisie d’une façon immédiate : la vie forme une totalité immédiate en tant que tout vivant appartient à la vie, mais cette totalité s’appréhende aussi progressivement, vivants après vivants. Le problème politique serait ici celui de la sécurité, recherche d’une totalité qui ne peut s’établir que par un mouvement centripète inachevable15.

Aménagement / catastrophe, plasticité / irrémédiable, communauté / individualité, naturalité/ construction discursive : ces dyades peuvent définir les gouvernements fondés sur la vie, ou qui le prétendent, et dont les ressorts concrets sont la peur, le racisme, l’évidence de la totalité et des relations vitales face à la discursivité et à l’artificialité de cette totalité et de ces relations, ce qui ouvre aux enjeux de sécurisation du monde et de protection des populations. Nos politiques et nos lois semblent bâties à partir de ces dualités paradoxales dont elles porteraient l’empreinte et que le néolibéralisme reprendrait, en tant qu’il ne cesse d’osciller entre intervention et suivi de la réalité, liberté d’entreprise ou de circulation et démultiplication des contrôles, etc.

Cependant, malgré la puissance de l’interprétation à toutes les échelles que la « vie » permet d'atteindre, on peut croire que cette notion piège la politique dans des paradoxes sans issue qui ne rendent pas compte de ses déroulements actuels et possibles. C’est ce qu’on peut établir de manière assez systématique en examinant certains problèmes posés par Esposito et Agamben au cours de leurs tentatives de penser la vie comme fondement du politique, où ils ont repris les couples paradoxaux que la vie permet d’envisager.

Les rapports entre individualité et communauté, irrémédiable et plasticité sont au centre de la philosophie d’Esposito. Celui-ci oppose l’immunité – la composition de rassemblements clos sur la base de la liberté et de la sécurité – à la communauté. Celle-ci correspond à la composition de rassemblements ouverts en tant que le commun est, par définition, en dehors de chacun. Esposito promeut la communauté face à la tendance à l’immunisation qu’il diagnostique et qu’il voit tourner à l’auto-immunisation, tandis que le monde entier est désormais l’instance de rassemblement, sans plus de dehors ni de coupures possibles. Il est remarquable que, pour mener cette réflexion, Esposito emprunte deux voies dont on peut se demander comment il les concilie, de même que l’on peut s'interroger sur la radicalité d’ensemble de son propos dont l’effectivité n’est pas évidente. En effet, selon lui, pour que la communauté soit possible, il est nécessaire de comprendre autrement la biologie et de la défaire des fausses lectures racistes dont le nazisme est la triste apogée – c’est la voie positive de construction de la communauté par un savoir lui-même positif. Mais il faut aussi et surtout comprendre que toute communauté est basée sur une incomplétude essentielle, métaphysique, des êtres : par une lecture de Heidegger et de Nancy, il est essentiel d’affirmer, dit Esposito, que l’être de ce qui est entre nous est le rien afin d’ouvrir la communauté à la seule historicité possible, l’historicité ouverte et indéterminée à la mesure du dehors qui fonde le commun16. La question qu’on peut alors se poser est de savoir comment concilier savoir biologique et essentialité d’un rien constituant (qui n’est pas seulement un manque et ne peut donc pas être comblé), et comment, alors, faire une histoire si celle-ci ne peut exister qu’en l’attachant à un vide, reconnu, respecté, omniprésent.

Les autres couples s’offrant, à partir de la vie, comme un moyen d’analyse des politiques contemporaines, la naturalité et la construction discursive, l’immédiat et la totalisation, correspondent quant à eux aux questions principales de la philosophie d’Agamben : que valent les discours du droit si, en dernière instance, le pouvoir se fonde sur le contrôle de la « vie nue », la plus biologique qui soit, et que tendanciellement ce fondement du pouvoir s’étend et s’inscrit dans le droit ? S’inquiétant de la colonisation du logos par la vie naturelle comme zoé au dépend de la vie humaine, c’est-à-dire en observant l’effacement de la vie humaine comme vie des humains (bios), Agamben peut sur cette base aller jusqu’à défendre l’idée d’une dépossession nécessaire et maximale pour défendre sa vie comme vie humaine – suivant le modèle franciscain. La question à se poser ici est alors de savoir s’il est possible, valable et souhaitable de sortir de l’espace légal, ce qui impliquerait également une sortie de l’espace social contemporain, au profit d’une vie et d’une société radicalement autres17.

On voit ainsi qu’en s’attachant à remonter à la source systématique des pouvoirs basés sur la vie, Esposito et Agamben arrivent à des positions limites, l’un autour de l’historicité et de la communauté, l’autre autour de la loi et de la vie. C’est que leurs questions sont fondationnelles, en quoi l’on peut croire que leurs critiques radicales n’en suivent pas moins complètement les cadres offerts par la notion de vie, ses pièges et ses limites en matière politique. En effet, celle-ci se propose facilement pour penser les extrêmes, et même pour penser aux extrêmes. Mais, comme on l’a vu, la question qui apparaît dans nos lois contemporaines n’est sans doute pas celle d'un passage aux extrêmes, parmi lesquels la prise de contrôle d’un biologisme plus ou moins scientiste. C’est tout au contraire le caractère composé, mélangé, médian de nos lois que l’on peut observer et qui se dérobe à la compréhension. Et c’est l’opération d’altération que nos lois effectuent ainsi (et qui les a produites) qu’il faut essayer de saisir : comment nos lois ont-elles le pouvoir, légitime et en vérité, de couper la continuité des vies à la fois au nom de la vie et en se plaçant en partie à l’extérieur des vies qu’elles coupent ? Comment nos lois, en tant que mixtes, peuvent-elles altérer la vie qui les fonde en partie ? Comment comprendre l’insertion du légal dans le vital qui correspond aussi à une puissance légale donnée à la vie ? La difficulté est de parvenir à penser cet entre-deux stable qui n’est ni un extrême, ni une tendance.

Le concept de « forme de vie » tel qu’il a été repris à Wittgenstein par Sandra Laugier et Stanley Cavell pourrait être proposé comme outil pour mener à bien la description de la forme variable, empirique et régulière du complexe juridique qui nous intéresse. La puissance de schématisation de ce concept et en même temps sa capacité à saisir le particulier paraît particulièrement adéquate pour cette tâche. Mais, suivant les derniers développements qui lui ont été donnés, on peut craindre qu’il produise les mêmes difficultés, à un niveau descriptif, que celles rencontrées par Esposito et Cavell, au niveau du fondement.

Si l’on entend en effet, à partir de Wittgenstein, par « forme de vie » ce qui fait sans condition préalable le commun des personnes, ce en quoi elles peuvent agir, penser, parler ensemble, la question posée par Cavell est de savoir si cette communauté de forme de vie exprime un communauté biologique, ou bien une communauté anthropologique et praxique18. L’homologie est frappante avec le problème posé par Agamben de la possibilité (ou non) d’engloutir les formes de vie humaine dans la forme de la vie, de telle sorte que le bios disparaisse dans le zoôn. La possibilité d’un discours partagé doit-elle être référée à un fond vital ou pas ? D’autre part, si à partir des formes de vie, il s’agit de fonder une éthique, le problème qui se pose est celui de l’établissement du rapport aux autres : se fait-il de proche en proche, d’attention aux uns et aux autres, ou s’enracine t-il dans un rapport commun à la vie, ainsi que l'explique Sandra Laugier ? À partir de la question de l’attention que nous portons aux formes de vie, le care rencontre une alternative analogue à celle que posait Esposito : l’ouverture à l’autre est sans cesse menacée, l’élan vers l’autre risque d’être arrêté, à moins que l’on ne trouve la source ontologique, véritablement interindividuelle d’une communauté affective perpétuellement renouvelée et dynamique.

D’Agamben et Esposito à Laugier et Cavell, les problèmes ne sont certes pas identiques, mais ils sont homologues. Le naturel et l’artificiel, l’immédiat et le conquis, le clos et l’ouvert, le proche et le total : toutes ces tensions prennent leur source dans la notion de vie, au point que toute question fondée sur cette notion, quel que soit son domaine d'origine, est peut-être nécessairement amenée à reprendre l’une de ces alternatives dont l’œuvre de Bergson pourrait être la philosophie la plus achevée.

   

De la parrêsia aux conditions d'existence collectives

Pour modifier les perspectives sans perdre de vue l’effectivité partielle de la vie qui nous préoccupe depuis le départ, la notion de parrêsia telle que Foucault l’a analysée présente alors certains attraits. En effet, dans celle-ci la « vie » possède un sens biologique tandis qu’on la risque et qu’on en manifeste, dans la parrêsia cynique, en tant qu’humain la dimension animale. Mais, en même temps, cette vie et les manifestations qu’on en tire est et reste existence humaine, exposition de l’humanité, bios et non zoôn19. D’autre part, l’exercice de la parrêsia s’accomplit clairement par une discontinuité, un surgissement qui interrompt l’action habituelle des pouvoirs avec l’individu qui prend la parole, et ce quelles que soient les formes de parrêsia que l’on peut distinguer20. C'est à partir de là que l’on peut poser, peut-être, la question politique contemporaine spécifique aux pratiques parrêsiastiques : comment penser aujourd’hui leur rapport à la loi comme institution, comment faire actuellement de la parrêsia un contre-pouvoir puissant, qui vaille non seulement par l’exemplarité et les contagions que celle-ci peut provoquer, mais qui puisse aussi aller jusqu'à modifier à partir de leur jeu les institutions ? Comment la puissance des ruptures parrêsiastiques pourrait-elle avoir des effets d’altération, que ceux-ci soient corrélés ou pas à l’indication de la possibilité d’une vie radicalement autre que ces ruptures apportent également ?

Pour répondre à ces questions, trois pistes sont sans doute à suivre, que nous ne ferons ici qu’esquisser. D’abord, il conviendrait de voir à quel point la parrêsia doit être associée à un pouvoir du parrêsiaste pour être possible et efficace. Socrate, dans le Lachès, acquiert le droit d’interroger des puissants – et donc de parler et de parler à – parce qu’il a été vertueux par la cohérence de son attitude en temps de guerre. De même, l’explication de sa position face à ses juges dans l’Apologie s’établit par sa participation aux institutions alors qu’il refuse d’en suivre le cours attendu, en votant contre la mise à mort des Arginuses et en refusant d’aller arrêter Léon de Salamine21. Ce n’est pas en étant en dehors des pouvoirs politiques, mais en y participant, à contre-courant s’il le faut, et toujours conformément à ses propos, que Socrate fait œuvre de parrêsiaste. En ce sens, ce qu’il faudrait définir à partir de la parrêsia, ce n’est pas le surgissement d’une altérité, mais la mise en œuvre d’une altération des lois et, corrélativement, du pouvoir du parrêsiaste. Le parrêsiaste, ce ne serait pas tant le sans-pouvoir que celui qui altère son pouvoir antérieur en prenant le risque de l’exercer autrement22. De là, il faudrait travailler en considérant que les contre-pouvoirs ne s’effectuent pas par des discontinuités individuées mais par des collectifs qui modifient lentement et laborieusement les discours, et leurs propres discours collectifs. Ce que les contre-pouvoirs peuvent présenter immédiatement comme traits unitaires dans les analyses de Foucault, par exemple dans ses articles sur l’Iran, lorsqu’il traite de la révolte des nu-pieds ou encore lorsqu’il introduit l’idée de contre-conduites, offre peut-être une perspective tronquée sur le jeu des pouvoirs. La continuité généalogique des pouvoirs sans origine ni composantes uniques implique en effet que le cours des choses doit toujours être étudié comme une reconstitution permanente – et en cela continue – des pouvoirs, quelles que soient les ruptures, puissantes mais momentanées en tant que ruptures, qui traversent le jeu des pouvoirs. Foucault n’est pas un penseur du pouvoir originellement constituant, mais du pouvoir sans cesse refait par sa multiplicité23. De là, enfin, il serait nécessaire de s’attacher à la discursivité complexe des contre-pouvoirs, qu’on ne pourrait jamais indexer sur un seul domaine discursif et qui ne pourrait jamais être immédiatement produite. Si la parrêsia surgit sur fond d’urgence et de nécessité, elle ne serait jamais, malgré ses apparences éventuelles, prise de parole brute.

De cela, tout autant que les textes de Foucault, les récits qui ont pu être faits de certaines de ses interventions politiques ou des actions qu’il a pu inspirer sont des témoignages du plus grand intérêt. Dans le cas du Groupe Information Prison par exemple, si celui-ci prit au final la forme d’une expression directe des prisonniers sans plus aucun relais (à terme dans le Comité d’Action des Prisonniers qui lui succéda), il fut dans les premiers temps porté par des personnes reconnues et expertes du monde pénitentiaire qui avaient initialement en vue la production de questionnaires experts avant que ceux-ci ne soient modifiés par les échanges avec les détenus et leurs familles. On retrouverait la même expérience de transformation de groupe au cours d’un essai de mise en place d’un contre-pouvoir dans l’histoire d’AIDES, d’abord constitué pour des raisons d’efficace à partir de gens de pouvoir acceptant de mettre en jeu celui-ci par leur protestation (médecins, hommes politiques, avocats) avant que les modalités d’action, les objectifs et la constitution du groupe ne se modifient24.

Altération et non altérité radicale, transformation et non surgissement, constitution multiple et non pas unité : ces formes des contre-pouvoirs, concevables à partir de la parrêsia telle que Foucault l’a analysée, sont peut-être aussi ce qui peut permettre d’échapper au biopouvoir, en théorie comme en pratique, notamment en refusant l’articulation du continu et du discontinu par laquelle celui-ci prétend s’exercer et que les contre-propositions politiques ont sans doute tout intérêt à ne pas reproduire.

Ce n’est pas du tout une raison pour faire disparaître la notion de « vie » des réflexions et de l’action politiques. Grâce à elle, de manière irremplaçable, les horizons de la mort, de la mise à mort, la prise de risque peuvent être liés avec la nécessité urgente de la prise de parole, la souplesse plastique des modes de vie que l’on peut élaborer, la spontanéité évidente qui accompagne le commun. Mais il faut penser les « formes de vie », c’est-à-dire la vie comme forme, avec les « formes d’existence » dans lesquelles ces formes de vie se déroulent, et qu’elles instituent en partie. Formes d’existence que sont par exemple les lois à la durée potentielle plus longue que peut l’être celle d’une vie individuelle, formes d’existence des discursivités collectives et associatives qui comportent une durée, une complexité et ainsi une distance avec les différentes vies qui les produisent. Formes d’existence enfin sur lesquelles il faut insister pour désamorcer les usages fallacieux des dynamismes de principe, individuels et collectifs, sur lesquels nous pourrions (et devons) toujours compter avant tout : la vitalité du vivant en fait certes quelque chose de fort, de résistant et de souple à défendre inconditionnellement, mais qui s’inscrit aussi dans des formes qui la dépassent, la conditionnent et peuvent l’écraser. La défense politique des vies n’a certes d’autre origine qu’elle-même et l’admiration qu’elle attache à la vie, mais elle ne peut être effective qu’en s’attaquant aux conditions d’existence, durables, composées et collectives.

   

Stéphane Zygart


  1. Didier Fassin, La Vie. Mode d’emploi critique, Paris, Le Seuil, coll. « La couleur des idées », 2018.↩︎

  2. Non seulement dans les pages célèbres de la Volonté de savoir (Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque des histoires », 1976) et dans le cours « Il faut défendre la société ». Cours au Collège de France. 1976 (Paris, Gallimard-Le Seuil-EHESS, coll. « Hautes études », 1997) mais aussi par l’orientation générale de ses analyses dans les cours au Collège de France entre 1977 et 1979: Sécurité, territoire, population. Cours au Collège de France. 1977-1978 (Paris, Gallimard-Le Seuil-EHESS, coll. « Hautes études », 2004) et Naissance de la biopolitique. Cours au Collège de France.1978-1979 (Paris, Gallimard-Le Seuil-EHESS, coll. « Hautes études », 2004).↩︎

  3. Michel Foucault, Subjectivité et vérité. Cours au Collège de France. 1981, Paris, Gallimard-Le Seuil-EHESS, coll. « Hautes études », 2014, p. 238-242.↩︎

  4. Loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé. Voir https://www.legifrance.gouv.fr/eli/loi/2016/1/26/AFSX1418355L/jo/article_190.↩︎

  5. Pour le compte-rendu de la séance de l’Assemblée Nationale, voir http://www.assemblee-nationale.fr/14/cri/2014-2015/20150210.asp#P508350. Pour le compte-rendu de la séance du Sénat, voir http://www.senat.fr/seances/s201509/s20150930/s20150930.pdf.↩︎

  6. Haute Autorité de Santé, Comment mettre en œuvre une sédation profonde et continue maintenue jusqu’au décès ? Guide parcours de soins, 2018 [https://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_2834390/fr/comment-mettre-en-oeuvre-une-sedation-profonde-et-continue-maintenue-jusqu-au-deces-guide-parcours-de-soins].↩︎

  7. Gilles Ducos et Olivier Fourcade, Limitation et arrêt des soins en réanimation, conférence d’actualisation [https://sofia.medicalistes.fr/spip/IMG/pdf/Limitation_et_arret_des_soins_Olivier_FOURCADE_Toulouse_.pdf] 2016, p. 4.↩︎

  8. Circulaire du 26 janvier 2018 du Recteur de l’Académie de Paris. Référence : LH/FG/GEB/1311/2018.↩︎

  9. M. Foucault, Naissance de la biopolitique, op. cit., Leçon du 28 mars 1979, p. 271-294.↩︎

  10. Sur la complexité des analyses de Foucault sur le droit, voir M. Foucault, « La vérité et les formes juridiques », in Dits et écrits, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque des sciences humaines », 1994, II, p. 538-646 ; et Mathieu Potte-Bonneville, « Droit », in D’après Foucault. Gestes, luttes, programmes, Paris, Les Prairies Ordinaires, 2003, p. 205-235.↩︎

  11. M. Foucault, « Crise de la médecine ou crise de l’antimédecine ? » [1976, n°170], in Dits et écrits, III, op. cit., p. 40-58.↩︎

  12. Sur le croisement possible de ces deux « thèmes », cf. M. Foucault, Les Anormaux. Cours au Collège de France. 1973-1974, Paris, Gallimard-Le Seuil-EHESS, coll. « Hautes études », 1999, p. 297-300.↩︎

  13. M. Foucault, « Il faut défendre la société », op. cit., p. 227-232.↩︎

  14. M. Foucault, Sécurité, territoire, population, op. cit., p. 64-65.↩︎

  15. Ibid., p. 46.↩︎

  16. Sur tous ces points, voir Roberto Esposito, Communauté, immunité, biopolitique. Repenser les termes de la politique, trad. fr. B. Chamayou, Paris, Les Prairies Ordinaires, 2010.↩︎

  17. Voir à ce sujet la somme des réflexions d’Agamben sur la biopolitique, Giorgio Agamben, Homo sacer : l’intégrale, 1997-2015, trad. fr. M. Raiola, Paris, Le Seuil, 2016, et l’article d’Estelle Ferrarese, « Le projet politique d’une vie qui ne peut être séparée de sa forme : la politique de la soustraction de Giorgio Agamben », in Raisons politiques, Presses de Sciences Po, 2015/1, n°57, p. 49-63.↩︎

  18. Sandra Laugier, « La vulnérabilité des formes de vie », in Raisons politiques, Presses de Sciences Po, 2015/1, n°57, p. 65-80.↩︎

  19. M. Foucault, Le Courage de la vérité. Le gouvernement de soi et des autres II. Cours au Collège de France. 1984, Paris, Gallimard-Le Seuil-EHESS, coll. « Hautes études », 2009, p. 244-245.↩︎

  20. M. Foucault, Le Gouvernement de soi et des autres. Cours au Collège de France. 1983, Paris, Gallimard-Le Seuil-EHESS, coll. « Hautes études », 2008, p. 311-314.↩︎

  21. M. Foucault, Le Courage de la vérité, op. cit., p. 72-73 et p. 135-138.↩︎

  22. Pour des analyses qui affirment au contraire un rapport entre parrêsia et subalternité, voir Orazio Irrera et D. Lorenzini, « Briser le silence. La prise de parole entre infrapolitique et parrêsia. », in Raisons politiques, Presses de Sciences Po, 2017/4, n°68, p. 65‑82.↩︎

  23. M. Foucault, « Nietzsche, la généalogie, l’histoire » [1971, n°84], in Dits et écrits, II op. cit.↩︎

  24. Sur le G.I.P. et AIDES, voir Daniel Defert, Une Vie politique. Entretiens avec Philippe Artières et Eric Favereau avec la collaboration de Joséphine Gross, Paris, Le Seuil, 2014, p. 55 et suiv., p. 107 et suiv., ainsi que Patrice Pinell (dir.), Une épidémie politique. La lutte contre le SIDA en France (1981-1996), Paris, PUF, 2002, où il est également question du G.I.P.↩︎